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la direction donnée à l’enseignement des académies et des séminaires dépend l’esprit même de l’Église. Si l’on n’ose point appeler à l’épiscopat des prêtres mariés, on a concédé à certains archiprêtres le droit de ceindre la mitre, ce qui leur donne un faux air d’évêques. En outre, le clergé blanc peut, comme le clergé noir, recevoir de la bienveillance gouvernementale des décorations de diverses sortes, faveurs dont l’un et l’autre clergé se sont montrés si friands qu’il a fallu leur interdire d’en parer leurs vêtements sacerdotaux. Encore cette défense ne s’étend-elle pas à la croix de Saint-Georges. Pour les popes qui ne peuvent aspirer aux ordres impériaux, il y a des récompenses plus modestes, telles que la barrette violette qui sert de prélude à la croix pastorale et au titre d’archiprêtre. Avec le haut professorat, avec les grandes aumôneries, avec les distinctions honorifiques et l’accès même du Saint-Synode, on ne peut plus dire que le clergé séculier soit sans avenir et sans carrière. L’épiscopat et les dignités monastiques sont à peu près seuls restés aux moines. Il est difficile de les dépouiller davantage sans les enfermer dans les murailles de leurs couvents et les isoler entièrement du monde et de la nation.

Quand il serait délivré de la misère et soustrait à la dépendance de ses paroissiens, qui pèse plus lourdement sur lui que la domination du haut clergé monastique, le clergé séculier ne sera définitivement relevé et mis à la hauteur de sa mission que par l’extension des libertés de l’Église et des libertés publiques. Comme toutes les classes de la nation, c’est dans l’émancipation morale, par une participation à son propre gouvernement, qu’il retrouvera sa force et sa dignité. Cet affranchissement a été déjà en partie effectué. Aux prêtres de paroisses on avait accordé, sous Alexandre ÏI, l’élection des blagotchinnye, sorte de doyens ou d’inspecteurs chargés de surveiller leurs confrères[1].

  1. L’élection n’a pas été officiellement abolie, mais elle n’est plus valable qu’avec îa confirmation épiscopale ; ce qui la rend souvent fictive.