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avait mis en avant un procédé en apparence fort simple, c’était d’élever les revenus du clergé en en réduisant le personnel. Jusqu’aux premières années du règne d’Alexandre III, le Saint-Synode s’est appliqué à diminuer le nombre des paroisses et, en même temps, le nombre des hommes d’Église. Il ne faisait, à son insu peut-être, qu’imiter les luthériens des pays scandinaves, où, pour des raisons analogues, on avait considérablement réduit le nombre des paroisses et des pasteurs[1]. Ce n’était pas là une réforme appropriée au culte orthodoxe et à l’empire russe. L’immensité du territoire lui opposait un obstacle presque insurmontable. Au moment où, sous Alexandre II, on entreprenait de réduire le nombre des paroisses, la Russie orthodoxe ne possédait point 39 000 églises (sans compter quelques milliers de petites chapelles), et beaucoup de ces églises étaient groupées dans les villes ou autour des villes. Au commencement du règne d’Alexandre III on en avait supprimé plus de trois mille. Quoique un certain nombre aient été reconstruites ou rouvertes depuis, on ne saurait dire que le chiffre en soit trop considérable pour un tel empire. En 1887 la Russie ne comptait pas en tout 33 000 paroisses. En se bornant aux campagnes, on trouverait que, avec un territoire onze fois plus vaste, la Russie d’Europe a sensiblement moins d’églises, moins de paroisses que la France.

Ce rapprochement donne une idée de la grandeur démesurée de certaines paroisses russes. Si le nombre en pouvait être réduit, ce n’était que dans les contrées les plus peuplées et surtout dans les villes, dans les vieilles cités moscovites, où, comme en Occident, avant la Révolution, la quantité des édifices religieux est en proportion de la piété des ancêtres et non de la population vivante. On avait posé en principe que chaque paroisse devait avoir environ un millier d’âmes, toujours sans compter

  1. Dollinger : Kirche und Kirchen.