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égards, demeurent en dehors des lois, se passent de ces coûteuses formalités : les mauvais ménages font casser leur union par l’assemblée du mir ou par les tribunaux de bailliage[1].

Près de chaque consistoire est placé un secrétaire laïque dont les fonctions, dans le conseil diocésain, rappellent celles du haut procureur près du Saint-Synode. Ce secrétaire est à la tête de la chancellerie éparchiale, chargée de la rédaction et de la correspondance. Nommé par le Synode sur la présentation du haut procureur, il reste sous la juridiction immédiate de ce dernier. C’est au procureur que le secrétaire adresse ses rapports, tandis que l’évêque et le consistoire envoient les leurs au Synode. Comme la plupart des employés des chancelleries ecclésiastiques, ce fonctionnaire laïque est, d’ordinaire, sorti d’une famille cléricale. Dans toute cette vaste administration, le haut procureur et ses principaux assistants sont à peu près les seuls qui, par la naissance, ne tiennent pas au clergé. L’influence du secrétaire et des chancelleries éparchiales sur la présentation des affaires, sur la nomination aux places, sur la décision des procès, a ouvert les portes de l’Église à la corruption administrative. C’est aux secrétaires de consistoires que l’on fait remonter la plupart des abus de l’administration ou de la justice ecclésiastiques. On en a vu s’ériger en entrepreneurs de divorces, mettre toutes les ressources de leur expérience au service des ménages mal assortis, fournir eux-mêmes des témoins aux époux désireux de faire constater un adultère fictif[2]. La littérature russe a parfois mis en scène de ces bureaucrates

    32 par suite de bigamie d’un des époux ; 17 pour impuissance ; 121 pour adultère : 482 pour absence prolongée ; 259 pour cause de condamnation aux travaux forcés ou à la déportation ; 9 mariages enfin avaient été annulés comme ayant été contractés entre parents à des degrés prohibés. On voit que l’adultère n’est pas la seule cause de rupture du lien conjugal admise par l’Église russe.

  1. Voyez t. II, liv. IV. chap. ii, p. 309 (2e éd.).
  2. Voyez plus haut, même livre, chap. iv.