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l’Église russe est demeurée indemne de la plaie invétérée de l’Église byzantine, la simonie.

L’existence extérieure des évêques russes est entourée d’un certain luxe, leur vie intérieure est sévère. Ils sont astreints à la résidence, conformément aux canons, à moins que la confiance du souverain ne les appelle à siéger au synode. Ils ne quittent guère leur ville épiscopale que pour de pénibles visites pastorales dans leurs immenses diocèses. Pris dans le cloître, les évêques ont d’ordinaire un couvent pour demeure. À travers les plus hautes dignités de l’Église et au milieu des honneurs les plus élevés de l’État, ils observent la rigoureuse abstinence des moines. Aux banquets des fêtes officielles, à la table même du tsar, ils ne touchent d’autres mets que les légumes et le poisson. Il est vrai que, dans leurs tournées pastorales, la mondaine vanité de leurs hôtes laïques, non contente de leur offrir les gras sterlets du Volga ou de la Dvina, se permet parfois, dit-on, de leur servir de l’oukha au bouillon[1].

Les évêques ne sont pas seulement subordonnés à l’autorité du synode, chacun d’eux est assisté d’un conseil ecclésiastique qui joue, dans le diocèse, un rôle comparable à celui du Saint-Synode dans l’empire : c’est le consistoire éparchial, éparkhialnaïa consistoria. Les membres en sont nommés par le synode sur la présentation de l’évêque ; et leurs décisions n’ont de validité qu’avec la confirmation épiscopale. Ces consistoires participent aux soins de l’administration diocésaine. Ce sont eux qui jugent en première instance les causes encore déférées à la justice ecclésiastique. Pour la plupart des affaires, spécialement pour la justice, le Saint-Synode sert de cour d’appel et de cour de cassation jugeant en dernier ressort. Les causes soumises aux tribunaux de l’Église peuvent se ranger sous deux chefs principaux : les affaires disciplinaires du

  1. Oukha, soupe maigre au poisson.