Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 3, Hachette, 1889.djvu/165

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Église, il ne saurait en pareille matière, être question d’expérience personnelle, ni de comparaison directe. Il faut se contenter de réponses plus ou moins nettes, plus ou moins sûres, arrachées à des gens qui sont eux-mêmes hors d’état de rapprocher des leurs les usages catholiques. Entre la confession orientale et la confession latine il semble s’être établi, dans la pratique, un intervalle que les années pourront élargir ou combler. La première paraît plus brève ou plus sommaire, moins explicite, moins exigeante ; elle est moins fréquente et elle est moins longue, ce qui diminue doublement l’influence qu’elle a sur le fidèle et l’autorité qu’elle donne au clergé. Elle semble se restreindre davantage aux fautes graves, parfois même se contenter de déclarations générales, sans désignation de péchés particuliers. Elle n’aime pas autant à spécifier, à préciser ; elle pénètre moins avant dans les secrets de la conscience et l’intimité de la vie. Les Russes ne mettent point entre les mains des fidèles de ces examens minutieux qui, jadis surtout, se rencontraient dans tous les pays catholiques. Ils ne mettent pas non plus, croyons-nous, aux mains des prêtres de ces théologies morales où l’anatomie du vice est poussée jusqu’à une répugnante dissection. Par tous ces côtés, la confession orthodoxe paraît plus simple et plus discrète, à la fois plus formaliste et plus symbolique que la confession romaine ; elle semble garder quelque chose de primitif et comme de rudimentaire. Ici encore, l’Église d’Orient se montre moins éprise de précision et de logique que l’Église latine, moins disposée à pousser sa doctrine à ses dernières conséquences.

En Russie, près du peuple surtout, c’est par interrogations que procède d’ordinaire le confesseur. Avec le paysan, le pope a, dit-on, deux questions habituelles : « As-tu volé ? t’es-tu enivré ? » à quoi le moujik répond en s’inclinant : « Je suis pécheur[1] ». Une telle réponse à une

  1. Ou « j’ai péché ; mon père, » gréchen, batiouchka.