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relles suscitées par elle, il importe de se rappeler qu’à la même époque les Jésuites, recueillis par Catherine, élevaient dans leurs collèges une partie de la jeunesse russe, tandis que Joseph de Maistre et les émigrés français introduisaient dans certains salons les idées catholiques. Les influences étrangères en lutte à Pétersbourg atteignaient jusqu’à la religion. Sous les souffles du dehors, deux courants opposés agitaient la surface d’une Église d’ordinaire stagnante. L’autorité ecclésiastique et civile ne pouvait manquer de s’en inquiéter. Entre les Jésuites d’un côté et la Société biblique de l’autre, la vieille orthodoxie semblait prise entre deux feux ; l’étranger menaçait la sainte Russie d’une double invasion. Le gouvernement autocratique, de sa nature défiant de toute impulsion indépandante, ne pouvait longtemps voir remuer des idées qui risquaient de troubler le calme habituel de l’Église. Il en assura le repos en frappant, à peu d’intervalle, les foyers des deux tendances contraires, la Société biblique et la Compagnie de Jésus. La première semblait triompher avec la fermeture des collèges des Pères ; elle fut dissoute peu de temps après leur exil. C’est ainsi que, selon le procédé russe, le gouvernement fit la paix en faisant le silence.

Depuis la suppression de la Société biblique, le Saint-Synode russe s’est singulièrement rapproché des pratiques de l’Église romaine. S’il encourage la diffusion de l’Évangile et du Nouveau Testament en langue vulgaire, il n’en est pas de même de l’Ancien Testament[1]. Tout comme chez les catholiques, le livre des Psaumes est le seul qui fasse exception. Les Psaumes ont, de tout temps, été fort populaires en Russie. Dans certaines contrées, on croyait qu’en lisant quarante fois le psautier on obtenait la rémission

  1. Le patriarcat de Constantinople procède à peu près de la même manière. Ce n’est qu’en 1817 qu’il a autorisé l’impression du Nouveau Testament en grec moderne ; et si, un peu plus tard, il permettait également la traduction de l’Ancien Testament, cette dernière donna lieu à de vives polémiques.