Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 2, Hachette, 1893.djvu/313

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

par des paysans sur des gens de même condition[1]. Parmi les délits soumis à ces assises villageoises figurent tous les actes contraires à une bonne police, tels que les disputes, les rixes, les désordres de toute sorte, Tivrognerie, la mendicité. Ensuite viennent les délits contre la propriété, escroqueries, abus de confiance et tout vol simple d’une valeur inférieure à trente roubles, puis les offenses aux personnes, injures, menaces, coups ou blessures légères. À côté de ces délits se rangent les infractions aux lois ou usages des paysans, sur le partage des terres communales ou les partages de famille, sur le domicile et les changements de résidence. Cette justice patriarcale se trouve ainsi chargée de maintenir l’obéissance à l’autorité traditionnelle de la commune, en même temps que le respect dû à ses fonctionnaires, aux anciens de volost ou de village, aux parents, aux vieillards et, selon le texte de la loi, « à toutes les personnes dignes d’une considération particulière ». À ce rustique tribunal revient le soin d’assurer l’autorité domestique aussi bien que l’autorité du mir, de faire régner l’ordre et la paix dans le ménage, comme dans la commune, du moujik. Il ne se borne pas toujours à ce rôle : il exerce parfois une véritable censure sur les mœurs, et va jusqu’à punir les infractions aux préceptes religieux, cela peut-être en vertu de l’antique notion de solidarité, de peur que la communauté ne soit châtiée pour les fautes d’un de ses membres.

Les tribunaux de volost ont à protéger la liberté et la sécurité de la femme et des enfants, aussi bien que l’auto-

  1. Les habitants des autres classes, les propriétaires et les gens à leur service, ne relèvent point des tribunaux de volost, pas plus que de l’autorité de l’ancien du village. Certains membres de la noblesse ont voulu s’autoriser de cette exemption pour réclamer, en faveur des grands propriétaires, un droit de justice ou de police sur leurs terres, disant qu’aujourd’hui d’immenses domaines, de plusieurs centaines de verstes carrées, restent sans police. Voyez, par exemple, M. Dmitrief, Revolutsionny conservatizm. On parlait en 1886 d’étendre la juridiction du tribunal de volost à tous les habitants du canton, en dehors des classes privilégiées.