Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 2, Hachette, 1893.djvu/101

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tratives sont pour la plupart tout artificielles, toutes conventionnelles, toutes mécaniques ; elles n’ont d’autre raison d’être que la volonté du pouvoir autocratique, qui a découpé à son gré le territoire de l’empire, sans tenir compte des traditions historiques, ni de l’origine des habitants[1]. À cet égard, les gouvernements russes ressemblent singulièrement aux départements français ; ils sont le produit du même esprit, des mêmes habitudes de centralisation. La nomenclature des goubernies russes n’a pas, du reste, les mêmes prétentions scientifiques que celle de nos départements ; elle est beaucoup moins compliquée, chaque gouvernement n’ayant, le plus souvent, d’autre nom que celui de son chef-lieu. Il n’y a guère d’exception que pour les provinces de l’ouest ou du sud, d’origine étrangère ou d’annexion récente : l’Esthonie, la Livonie, la Courlande, la Podolie, la Volhynie, la Bessarabie, la Tauride. Ces noms historiques suffisent seuls à dénoter une individualité provinciale, d’ordinaire étrangère à la vieille Russie.

Les circonscriptions territoriales de l’empire diffèrent de nos départements par un point important, les dimensions. L’autocratie russe n’a pas, de même que la révolution française, cherché à fractionner le pays en minces parcelles, comme pour y rendre plus impossible toute velléité d’indépendance de la vie locale. L’État le plus vaste est celui dont les divisions administratives sont les moins nombreuses. Les provinces russes varient singulièrement de grandeur selon les régions, le climat, la densité de la population. Les gouvernements du nord

    les gouvernements proprement dits (goubernii) et les territoires ou régions (oblasty) qui n’ont pas encore une organisation complète ou gardent quelques institutions particulières. Le nombre des oblast, d’ordinaire situées aux extrémités de l’empire, va du reste en diminuant avec les progrès de la population et de la centralisation.

  1. Les historiens ont remarqué l’extrême petitesse des unités locales dans l’ancienne Moscovie, et comment de ces unités on formait les combinaisons les plus bizarres. Voyez, par exemple, A. Gradovski : Syst. mesin. oupravl., II (Sbornik Gosoud, znaniiy, tome VI, 1878).