La seconde des trois grandes sources d’où l’on peut faire découler le peuple russe, celle-là plus particulière à la Russie, plus décidément asiatique, a reçu de l’usage le nom de tatare. Jamais dénomination plus équivoque ne s’est introduite dans l’histoire, dans la philologie, dans l’ethnographie. À son apparition en Russie, ce nom de Tatar était porté par une des tribus mongoles qui fondèrent l’empire de Ginghiz-Khan. Dans sa terreur de ces nouveaux barbares, qui lui semblaient sortis de l’enfer, l’Europe du treizième siècle les appela Tartares, et ce nom, inspiré d’une réminiscence classique, s’étendit à la foule hétérogène des peuples entraînés à la suite des sauvages conquérants. Enlevé aux tribus auxquelles il appartenait, le vieux nom mongol a fini par désigner la branche de la souche oura-altaïque dont le Turkestan a été le point de départ, et dont les Turcs sont les principaux représentants. Les Tatars demeurés au bord du Volga sont proches parents des Turcs, ou mieux, ce sont des Turcs, au même titre que les Ottomans, sortis du même berceau et parlant des dialectes d’une même langue ; toute la différence est qu’ils ont envahi l’Europe par une autre route et n’ont embrassé l’islamisme qu’après leur invasion. Aujourd’hui encore les rejetons des tribus du Turkestan qui, sous la