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moins nombreux, dispersés sur les rives du Volga, dans l’ancien territoire des Tatars de Kazan, dont ils ont adopté la langue[1]. Enfin au nord-ouest vient la famille finnoise proprement dite, dont les principaux représentants sont les Finnois Finlandais, subdivisés en deux ou trois tribus, les Suomi, comme ils se nomment eux-mêmes, à peu près les seuls qui aient un sentiment national, une patrie, une histoire, une littérature, les seuls aussi à peu près sûrs d’échapper à la lente absorption où s’engloutissent tous leurs congénères. Ils forment les cinq sixièmes de la population du grand-duché de Finlande, mais une population presque toute rurale, l’élément suédois, mêlé d’allemand et de russe, dominant toujours dans les villes. Dépassant le chiffre de 1 800 000 âmes dans le grand-duché, les Suomi comptent ecore pour environ 250 000 dans la population des gouvernements russes voisins.

Pétersbourg est, à vrai dire, bâti en plein pays finnois, les alentours immédiats sont seuls russifiés, et cela tout récemment. Il y a un demi-siècle à peine, on ne comprenait point le russe dans les villages situés aux portes de la capitale ; aujourd’hui encore elle est à peu près de tous côtés environnée de débris de tribus finnoises. Au nord-ouest, ce sont les Suomi de la Finlande qui descendent presque jusqu’à ses faubourgs ; à l’ouest, vers les grands lacs, les Karéliens et les Yèses, qui paraissent avoir longtemps occupé un vaste territoire ; au nord-ouest, ce sont 900 000 Esthoniens ou Ehstes, qui, soumis pendant quatre à cinq siècles à la domination de seigneurs allemands, ont dans l’Esthonie et la Livonie septentrionale résisté à la germanisation[2]. À cette branche finnoise appartiennent encore

  1. Toutes ces peuplades finnoises ont longtemps été prises par les étrangers pour des Tatars. (Voyez par exemple l’Anglais Fletcher : la Russie au seizième siècle, trad. franc., 1864, t. II, chap. xix.) Les anciens voyageurs ont ainsi contribué à accréditer l’opinion de l’origine tatare des Russes.
  2. D’après les tableaux publiés par M. Rittich, les Allemands ne compteraient dans la population des trois provinces baltiques (Esthonie, Livonie,