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ment enfermer ; on aurait beau clore la maison, une fois introduit au foyer il saura bien se répandre au dehors.

Pour survivre à la transformation actuelle, il faut que la commune cesse de peser sur l’individu, il faut qu’elle laisse toute liberté à la personnalité. De même que, pour garder ses enfants devenus grands, le père de famille cherche à leur rendre insensible le poids de l’autorité paternelle, pour retenir le paysan dans les liens de la communauté, la commune russe en devra alléger les chaînes et adoucir le joug. L’antique régime agraire n’a de chances de durée qu’en se prêtant aux exigences de l’individualisme moderne ; or le mir moscovite en est-il capable ? Avec le communisme de la famille patriarcale, la solidarité des membres est inévitable ; c’est là une des raisons de l’actuelle décadence de la zadrouga serbe et des communautés de famille, chez les Slaves du sud. En est-il nécessairement de même avec les communautés de village ? Dans notre âge de liberté individuelle et d’ardente concurrence, entre les peuples comme entre les hommes, une institution économique ou politique ne peut, en effet, subsister qu’à deux conditions, étroitement liées l’une à l’autre : la première, c’est de ne pas gêner l’activité individuelle ; la seconde, de ne point entraver la production nationale. L’étude du mode de jouissance et du mode de partage, usités dans le mir, nous montrera quels sont, à ce double égard, les effets et les défauts de la commune russe.