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CHAPITRE II


Les communautés de village ont leur prototype dans la famille. — La commune souvent envisagée comme une famille agrandie. — Filiation des communautés de village et des communautés de famille. — Les mœurs patriarcales chez le moujik et l’ancienne famille villageoise. — Autorité du chef de ménage. — Communauté des biens. — L’émancipation a relâché les liens domestiques. — Accroissement des partages de famille. Leurs inconvénients matériels et leurs avantages moraux. — Servitude des femmes. — Progrès de l’individualisme, ses conséquences.


Aux communaulés de village de la Grande-Russie, on peut trouver un type primitif plus ancien, plus simple encore et cependant toujours vivant, la famille. Dans l' izba du moujik, la famille, en elTet, a jusqu’à nos jours gardé un caractère patriarcal, antique, archaïque. Chez les paysans, la propriété reste indivise entre les enfants ou les frères qui habitent ensemble ; chaque fils, chaque homme de la maison y a un titre égal. La commune agraire semble se retrouver en germe dans la famille ; l’une paraît faite sur le modèle de l’autre. La commune russe peut ainsi être regardée comme une famille agrandie, où le sol est demeuré la propriété collective de la communauté, chaque homme ou chaque ménage en recevant en jouissance une part égale. Aussi, a-t-on souvent considéré le mir moscovite comme une simple extension de la famille, devenue trop nombreuse pour habiter dans le même enclos ou cultiver en commun.

Dans ce système, la communauté des intérêts, engendrés par le voisinage, a continué de lier entre eux des habitants, déjà réunis par le souvenir ou la tradition d’une parenté originaire. Au caractère familial ou patriarcal primitif s’est