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se forme sur son nom ; Eberhard se plaît visiblement à les conter. Nous devons ainsi à d’honnêtes marchands étrangers de, savoir que, à aucun moment de son existence, Jeanne ne fut connue autrement que par des fables et que, si elle remua les foules, ce fut par le bruit des innombrables légendes qui naissaient sur ses pas et volaient devant elle. Et il y a lieu de réfléchir sur cette éclatante obscurité qui dès le début enveloppa la Pucelle, ces nuages radieux du mythe qui, en la cachant, la faisaient apparaître.

3° Avec ses mémoires, ses consultations et ses cent quarante témoignages, fournis par cent vingt-trois témoins, le procès de réhabilitation[1] offre un riche recueil de documents. M. Lanéry d’Arc a fort bien fait de publier intégralement les mémoires des docteurs ainsi que le traité de l’archevêque d’Embrun, les propositions de maître Henri de Gorcum et la Sibylla Francica[2]. Le procès de 1431 nous apprend de reste ce que les théologiens du parti de l’Angleterre pensaient de la Pucelle ; sans les consultations de Théodore de Leliis et de Paul Pontanus et les opinions insérées au procès posthume on ignorerait l’idée que se faisaient d’elle les docteurs d’Italie et de France ; et il importe de connaître

  1. Procès, t. II à 111, 1844-45. (Les tomes V et VI, 1846-47, contiennent les témoignages.)
  2. Lanéry d’Arc, Mémoires et consultations en faveur de Jednne d’Arc, Paris, 1889, in-8°,