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discussion aride et confuse, qui ne nous conduirait à rien de certain, nous allons étudier ces deux premiers livres, et, tout en nous gardant bien de décider, de notre propre autorité, si le second livre a été composé avant le premier, c’est celui-ci que nous examinerons d’abord. L’ordre des matières, quoique de médiocre importance chez notre auteur, nous en fait une obligation. Car il est certain que Pantagruel est fils de Gargantua. On ne peut douter de cette filiation. Nous allons faire connaissance avec ces deux horribles géants, qui sont, au fond, de très bonnes personnes, et vivre dans leur société qui est honnête et même exemplaire. Près d’eux, nous allons passer à chaque instant du plaisant au sévère et du bouffon au sublime. Nous allons goûter tour à tour le sel attique et le sel de cuisine. Je crois que vous trouverez de la saveur à l’un et à l’autre ; mais ce dont je puis vous répondre, c’est que, dans le commerce des géants et de leurs familiers, vous n’entendrez rien (j’y veillerai) qui puisse offenser les plus chastes, les plus craintives, les plus délicates oreilles. Je serai prudent, je serai… Je m’arrête. Vous finiriez par trouver, mesdames, que j’en promets trop.