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sont exemptes des ciseaux d’Atropos ; toutes sont immortelles : anges, démons et humaines.

Puis, comme il se plaît à enfiler des histoires, il conte celle du pilote Thamous, que, toute connue qu’elle est, nous ne pouvons passer car elle est trop belle et inspire de trop insatiables curiosités. Elle est aussi tirée du traité Des Oracles qui ont cessé. La voici dans la traduction que Jacques Amyot donna des Œuvres morales de Plutarque un petit nombre d’années après la publication du quatrième livre de Pantagruel. Le style en est agréable et facile. Je n’y ferai pas d’autre changement que de corriger un contresens, car, je le dis en passant, Amyot a moins bien lu et compris son texte que Rabelais :

« Épitherses, maître en grammaire, contait que, pour aller en Italie, il s’embarqua un voyage sur un navire chargé de plusieurs marchandises, et de grand nombre de passagers, et disait que, sur le soir, le vent leur faillit auprès des Îles Échinades, et que leur navire alla roulant, tant qu’il arriva près des Paxes, que la plupart des passagers étaient veillant, et y en avait beaucoup qui buvaient encore, achevant de souper, quand tout soudain on entendit une haute voix, venant de l’une de ces îles de Paxes, qui appelait Thamos si fort qu’il n’y eut aucun de la compagnie qui n’en demeurât tout ébahi. Ce Thamos était un pilote égyptien que peu de ceux qui étaient en la nef connaissaient par son nom.