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le voir, à enfoncer trois fois une épingle dans un volume d’Homère ou de Virgile et à tenir pour un oracle les vers marqués par la pointe. Panurge a recours à cette sorte de divination. Malheureusement, il ne put rien tirer de clair des vers ainsi désignés. Pantagruel lui conseilla d’user de la divination par les songes.

— L’âme dans le sommeil, dit ce bon roi, s’ébat et revoit sa patrie qui est le ciel. Là elle reçoit participation insigne de sa première et divine origine et, en contemplation de cette sphère infinie dont le centre est partout et la circonférence nulle part, à laquelle rien n’arrive, rien ne passe, rien ne déchet, pour qui tous les temps sont présents, l’âme note non seulement les choses qui se sont passées dans les mouvements inférieurs, mais aussi les choses futures, et, les rapportant à son corps et les faisant connaître par les sens et organes du corps, auxquels elle les a communiquées, elle est appelée vaticinatrice et prophète.

Cette fameuse définition de Dieu, qui a cela de remarquable qu’elle définit parfaitement le non-être et l’absence absolue de Dieu, se retrouve, ai-je besoin de vous le dire, dans Pascal. Pour en chercher l’auteur, il faudrait remonter aux philosophes alexandrins, et peut-être même aux empiriques grecs. Ce serait un peu long. Ne quittons point Panurge.

Il eut recours à la divination par les songes et