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vait. Étienne Lorens, qui appartenait au roi, s’entourait volontiers, à ce qu’il semble, de gens doctes, inclinant à la Réforme. Tel était cet Antoine Hullet, à qui Rabelais écrivit de Saint-Ay une lettre qui nous a été conservée par grand hasard, par laquelle l’inventeur du pantagruélisme l’invite philosophiquement à venir se joindre aux hôtes de l’ancien serviteur de Langey. Il s’efforce de l’attirer par l’appât des poissons arrosés du vin du cru, qui était excellent. Rabelais sans doute aimait la table, mais prenez garde que, quand il parle de banquets, il songe le plus souvent au banquet des Muses, et que le vin qu’il célèbre est le vin de la sagesse. Enfin, conviant Antoine Hullet à la table de Saint-Ay dont il lui vante les poissons : « Vous viendrez, lui dit-il, non quand il vous plaira, mais quand le vouloir vous y apportera de ce grand Dieu, bon et plein de pitié, lequel ne créa oncques le carême, mais bien les salades, harengs, merluches, carpes, brochets, bars, ombrines, ablettes, rippes, etc., item les bons vins, singulièrement celui qu’on garde ici à votre venue, comme un Saint-Graal et une seconde essence, voire quinte essence. Ergo veni, domine, et noli tardare. »

En 1545, Rabelais obtint du roi François Ier un privilège pour l’impression du troisième livre de Pantagruel qui parut l’année suivante sous ce titre : Tiers livre des faits et dits héroïques du bon Pantagruel, composé par Maître François Rabe-