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quet. Elle aime les fleurs. Elle les aime parce qu’elles sont belles, et c’est une raison, cela ! Les belles choses sont aimables ; elles ornent la vie. Quelque chose de beau vaut quelque chose de bien, et c’est une bonne action que de faire un beau bouquet.

Catherine cueille des bleuets, des coquelicots, des coucous et des boutons d’or, qu’on appelle aussi cocottes. Elle cueille encore de ces jolies fleurs violettes qui croissent au bord des blés et qu’on nomme des miroirs de Vénus. Elle cueille les sombres épis de l’herbe à lait et des crêtes de coq, qui sont des crêtes jaunes, et des becs de grue roses et le lys des vallées, dont les blanches clochettes, agitées au moindre souffle, répandent une odeur délicieuse. Catherine aime les fleurs parce que les fleurs sont belles ; elle les aime aussi parce qu’elles sont des parures. Elle est une petite fille toute simple, dont les beaux cheveux sont cachés sous un béguin brun ; son tablier de cotonnade recouvre une robe unie ; elle va en sabots. Elle n’a vu de riches toilettes qu’à la Vierge Marie et à la sainte Catherine de son église paroissiale. Mais il y a des choses que les petites filles savent en naissant. Catherine sait que les fleurs sont des