Page:Anatole France - M. Leconte de Lisle à l’Académie française, paru dans Le Temps, 27 mars 1887.djvu/18

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Tu t’en venais ainsi, par ces matins si doux,
De la montagne à la grand’messe,
Dans ta grâce naïve et ta rose jeunesse,
Au pas rythmé de tes Hindous.

Maintenant, dans le sable aride de nos grèves,
Sous les chiendents, au bruit des mers,
Tu reposes parmi les morts qui me sont chers,
Ô charme de mes premiers rêves.

Ces vers sont voisins de la jeunesse du poète. Mais on en trouve l’écho pur et clair dans un poème tout récent, l’Illusion suprême.

Ô chère vision, toi qui répands encore,
De la plage lointaine où tu dors à jamais,
Comme un mélancolique et doux reflet d’aurore
Au fond d’un cœur obscur et glacé désormais !

Les ans n’ont pas pesé sur ta grâce immortelle,
La tombe bienheureuse a sauvé ta beauté ;
Il te revoit avec tes yeux divins, et telle
Que tu lui souriais en un monde enchanté.
..................