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tour qu’il n’est pas facile de faire boire un âne qui n’a pas soif. On arrête les républicains, et personne ne bouge. Quand ce sera le tour des royalistes d’être arrêtés, personne ne bougera non plus. Vous pouvez y compter, la foule ne se grouillera pas pour vous délivrer, vous, monsieur Henri Léon, et, votre ami M. Déroulède.

» — Je vous avoue qu’à la lueur de ces paroles, je crus entrevoir la profondeur lugubre de l’avenir. Je répondis néanmoins avec quelque ostentation :

» — Citoyen Bissolo, il subsiste pourtant entre vous et nous cette différence que vous êtes pour la foule un tas de vendus et de sans-patrie, et que nous, les monarchistes et les nationalistes, nous jouissons de l’estime publique, nous sommes populaires.

» À ces mots, le citoyen Bissolo sourit bien agréablement et dit :

» — La monture est là, monseigneur ; vous n’avez qu’à l’enfourcher. Mais quand