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Ils rentrèrent tard au palais sans autre chemise que la leur, et trouvèrent le roi Christophe et madame de la Poule qui pleuraient à chaudes larmes en écoutant une sonate de Mozart.

Au contact du roi, madame de la Poule devenue mélancolique, nourrissait des idées sombres et de folles terreurs. Elle se croyait persécutée, victime de machinations abominables ; elle vivait dans la crainte perpétuelle d’être empoisonnée et obligeait ses femmes de chambre à goûter tous les plats de sa table. Elle ressentait l’effroi de mourir et l’attrait du suicide. L’état du roi s’aggravait de celui de cette dame avec laquelle il passait de tristes jours.

— Les peintres, disait Christophe V, sont de funestes artisans d’imposture. Ils prêtent une beauté touchante aux femmes qui pleurent et nous montrent des Andromaque, des Artémis, des Madeleine, des Héloïse, parées de leurs larmes. J’ai un por-