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bien dit. L’État est encombré ; il y a trop de bacheliers, ce qui est tout de même un bien. D’ailleurs, je suis là ; je t’aiderai, je travaillerai pour toi ; mes bras sont bons encore. Tu auras de l’argent de poche, car il en faut dans le monde où tu vas. Nous nous gênerons. Mais aide-toi, sois brave à l’ouvrage, cogne fort et pousse droit. On n’en est pas moins gai pour cela. Ta besogne faite, ris, chante, amuse-toi, mon garçon ; ce n’est pas moi qui y trouverai à redire. Et, quand tu auras une belle position, si je suis encore de ce monde, ne crains rien : je ne te gênerai pas. Je ne fais pas de bruit, moi. Je me cacherai dans un petit trou avec ta tante, et personne n’entendra parler du bonhomme. »

La tante, qui s’était glissée dans la boutique depuis un moment, éclata en sanglots ; elle voulait bien, comme son frère, se cacher dans un coin ; mais quand son