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d’une atmosphère de miracles ; il lui semblait nécessaire que quelque chose de divin s’accomplît. Ces enfants se racontaient des histoires étranges et pieuses qu’ils avaient lues dans quelque petit livre d’édification. C’était l’apparition d’un moine sorti de la tombe avec les pieds et les mains percés et le côté ouvert ; ou quelque religieuse, belle comme les figures voilées des tableaux d’église, expiant dans le feu de l’enfer des péchés mystérieux. Jean avait son histoire préférée. Il contait en frissonnant que saint François de Borgia, après la mort de la reine Isabelle, qui était d’une beauté magnifique, dut faire ouvrir le cercueil où elle reposait dans sa robe brodée de perles ; son imagination refaisait cette morte royale, la revêtait de toutes les magies de l’inconnu et épiait sur elle les enchantements de la beauté dans les abîmes de la mort. Et tout en parlant, il