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deux yeux de flamme aux salutations courtoises que le professeur ne manquait jamais de lui faire, avec un tour particulier de ses petites prunelles grises.

Un jour le marquis Tudesco entra dans la boutique en titubant ; ses yeux qui pétillaient et sa bouche arrondie par une disposition à l’éloquence et à la volupté, son nez capable, ses joues roses de beau vieillard, ses mains grasses entr’ouvertes et son gros ventre lestement porté lui donnaient, sous le veston et le feutre, une parfaite ressemblance avec un petit dieu agreste de ses ancêtres, le vieux Silène.

La leçon fut, ce jour-là, vague et capricieuse. Jean récitait d’un ton monotone : moneo, mones, monet… monebam, monebas, monebatTout à coup, M. Tudesco se poussa en avant, fit horriblement grincer sa chaise et, posant le bras sur l’épaule de son élève, lui dit :

— « Jeune enfant, je vais te donner