Page:Anatole France - Les Désirs de Jean Servien.djvu/232

Cette page a été validée par deux contributeurs.

est amoureux. Il a une passion ; je l’ai compris par tout ce qu’il disait dans son délire. Je n’ai pas l’habitude de m’occuper de ce qui ne me regarde pas ; mais, comme je vois que la chose est grave, je vous demanderai, dans son intérêt, de me la dire, si vous la savez. »

Garneret haussa les épaules :

— « Une actrice, une tragédienne ! bah ! »

Le relieur réfléchit un instant ; puis :

— « Voyez-vous, monsieur Garneret, bien que j’aie agi pour le mieux à l’égard de mon pauvre garçon, je me fais des reproches. Je me dis que l’instruction que je lui ai donnée l’a détourné du travail et de la vie pratique… Une tragédienne, dites-vous ? Ces goûts-là doivent se prendre dans les collèges. Du temps qu’il allait en classe, je prenais ses cahiers dès qu’il était au lit, et je lisais tout ce qui était en français. C’était pour moi une manière