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de bouche en bouche avec toutes sortes de déformations. Les derniers venus apprirent qu’on venait d’arrêter un général allemand qui s’était introduit comme espion dans Paris, pour livrer la ville avec l’aide des bonapartistes.

Le passage redevenu libre, Jean vit M. Bargemont sortir de la mairie. Il était fort rouge et la manche de son pardessus disloquée.

Jean eut l’idée de le suivre.

Le long des boulevards, il le suivit par amusement, de fort loin et sans s’inquiéter de le perdre ; mais quand le fonctionnaire prit une rue transversale, le jeune homme le serra de plus près ; il ne songeait encore à rien ; un instinct le poussait. M. Bargemont tourna à droite ; la rue assez large était déserte et mal éclairée par des quinquets de pétrole qui remplaçaient les becs de gaz. Cette rue, Jean Servien la connaissait mieux que toute