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qu’emplissait une eau de réglisse et que bouchait un citron. Rien n’était changé, ni la dragueuse, ni les radeaux de bois flotté, ni la marchande de gâteaux, ni les lourds étalons élevés aux quatre angles du pont d’Iéna.

Et Jean Servien entendait les arbres du quai, l’eau de la rivière, les pierres du parapet qui lui criaient :

« Nous te reconnaissons ; tu es le petit garçon que ta tante, en bonnet de paysanne, nous amenait autrefois. Mais nous ne reverrons plus ta tante, ni son châle d’indienne, ni son parapluie qu’elle ouvrait au soleil ; car elle est vieille maintenant et ne promène plus son neveu grandi. Et l’enfant devenu homme a été blessé par la vie, tandis qu’il poursuivait des ombres. »