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— « Suis-je ridicule, maintenant ? »

Telles étaient ses imprécations, quand il sentit une main peser sur ses épaules. En se retournant, il vit une singulière figure : un gros nez en pied de marmite, des épaules hautes et fortes, des mains énormes et bien faites, un ensemble malgracieux, puissant et sympathique. Il chercha un instant d’où venait le monstre, puis il s’écria : « Garneret ! »

Et sa mémoire lui représenta en une seconde dans la cour et dans les classes du pensionnat de la rue d’Assas un gros garçon toujours au piquet pendant les récréations, recevant et donnant de grands coups de poing, terrible de sincérité et de courage, laborieux, rude à ses maîtres, sans cesse enguignonné, mais étonnant, de temps à autre, la classe par des coups de génie.

Il eut de la joie à retrouver ce camarade qui lui parut presque vieux avec ses