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Il répondit brièvement, avec beaucoup de sens, aux questions de ma chère maman. Nous apprîmes qu’il travaillait l’hiver à Paris, et, vers le printemps, retournait à pied dans son pays. Sa mère, trop pauvre pour acheter une vache, se louait dans les fromageries. Il travaillait avec elle ou cueillait dans la montagne, pour les confituriers de la ville, des maurels : c’est le nom qu’il donnait aux baies du myrtil. Ils vivaient de galette et n’en avaient pas leur saoul.

Je résolus de faire des économies pour acheter une vache à la mère d’Adéodat, mais ne tardai pas à oublier cette résolution. Le petit ramoneur partit pour son pays au printemps. Ma chère maman envoya des vêtements de laine et un peu d’argent à sa mère. Et, l’ayant trouvé sérieux et intelligent, elle écrivit au maître d’école du village qu’il lui apprît à lire, à écrire et à compter, qu’elle se chargeait des frais de son instruction. Adéodat lui écrivit en lettres moulées ses remerciements.

Je demandai plusieurs fois des nouvelles de mon frère, j’en demandai encore à l’entrée de l’hiver.

— Ton frère est resté dans son pays, me