Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/333

Cette page a été validée par deux contributeurs.

madame Fusellier moudre le café dans son moulin.

Thérèse lui dit :

— Pourquoi n’avez-vous pas d’orgueil ?

Elle ajouta peu de mots, mais elle parlait avec ses yeux, ses bras, avec le souffle qui élevait et abaissait sa poitrine.

Dans l’étonnement heureux de la voir et de l’entendre, il se laissa convaincre.

Elle lui demanda qui avait dit cette parole odieuse.

Il n’avait aucune raison de le lui cacher. C’était Daniel Salomon.

Elle n’était pas surprise. Daniel Salomon, qui passait pour ne pouvoir être l’amant d’aucune femme, voulait du moins se mettre dans l’intimité de toutes, et savoir leurs secrets. Elle devinait pourquoi il avait parlé :

— Jacques, ne soyez pas fâché de ce que je vais vous dire. Vous n’êtes pas très adroit pour cacher vos sentiments. Il a soupçonné que vous m’aimiez, et il a voulu s’en assurer. Je suis sûre que maintenant il n’a plus de doutes sur nos relations, mais cela m’est bien indifférent. Au contraire, si vous saviez mieux dissimuler, je serais moins tranquille. Je croirais que vous ne m’aimez pas assez.

De peur de l’inquiéter, elle passa vite à d’autres idées :