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cle, ayant une statuette pour poignée, clochettes plates et claires des vaches des vallées du Rutli, cloches indoues qu’on fait résonner mollement avec une corne de cerf, cloches chinoises en forme de cylindre ; elles étaient venues là de tous les pays et de tous les temps, à l’appel magique de cette petite miss Bell.

— Vous regardez mes armes parlantes, dit-elle à madame Martin. Je crois que toutes ces misses Bell se plaisent ici et je ne serais pas trop étonnée si un jour elles se mettaient à chanter ensemble. Mais il ne faut pas les admirer toutes également. Il faut garder les louanges les plus pures et les plus ferventes pour celle-ci.

Et, frappant du doigt une cloche sombre et nue, qui rendit un son grêle :

— Celle-ci, reprit-elle, est une sainte villageoise du ve siècle. C’est une fille spirituelle de saint Paulin de Nole, qui le premier fit chanter le ciel sur nos têtes. Elle est d’un métal rare, qu’on a nommé airain de Campanie. Bientôt je vous montrerai près d’elle une florentine de toute gentillesse, la reine des cloches. Elle va venir. Mais je vous ennuie, darling, avec ces babioles. Et j’ennuie aussi la bonne madame Marmet. C’est mal !

Elle les conduisit à leurs chambres.

Une heure après, madame Martin, reposée, fraîche, en déshabillé de foulard et de dentelle,