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Joseph Delorme se survécut si bien qu’il eut, après sa mort, une suite dite Poésies du lendemain ou dans le même ton. Dans cette existence posthume, il se raffine et veut que ses poèmes sentent leur anthologie. C’est dans le moment où il est le plus intime, le plus familier, qu’il entend rappeler Callimaque ou Méléagre. La prétention pourrait être plus mal fondée. Ce n’est pas en faisant du grec qu’on ressemble le plus aux Grecs. Les Grecs étaient peu archéologues et ignoraient avec une parfaite candeur tout ce qui n’était pas eux-mêmes. Ils ne haussaient pas le ton mal à propos et savaient garder la mesure. A cet égard, tel vers tout français, juste de sentiment et de diction, naturel d’allure, peut avoir pour les vrais doctes plus de parfum antique que telle tirade sur les Atrides. La familiarité noble, la liberté décente, la beauté facile, furent si bien choses grecques qu’on ne peut les rencontrer dans un autre climat sans leur trouver un air de Grèce.

Il n’y avait pas un an que Joseph Delorme était lancé, quand l’auteur donna, en décembre 1829, sous son nom cette fois, un nouveau recueil de poésies, les Consolations. Tout le livre respire la piété la plus vive et la plus tendre pour Victor Hugo. Sainte-Beuve était tourmenté à cette époque d’un grand besoin de com-

dine et au gros Chariot de faire du bruit pendant qu’il parlerait. Mais ils se gardaient d’obéir, et l’on entendait les beaux vers de Joseph Delorme et des Consolations. »

(Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie, t. h, pp. 180-181.)