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parloient à elle en estoient grandement ravis et en faisoient de grands rapports à ceux de leur nation, à leur retour, dont sur ce elle en soulageoit le roy son frère, car ils l’ail oient toujours trouver, après avoir fait leur principale ambassade ; et bien souvent, lorsqu’il avoit de grandes affaires, les remettoit à elle, en attendant la définition et totale résolution. Elle les sçavoit fort bien entretenir et contenter de beaux discours, comme elle y estoit fort opulente et fort habile à tirer les vers du nez d’eulx : d’ond le roy disoit souvent qu’elle lui assistoit bien et le deschargeoit beaucoup par l’industrie de son gentil esprit et par doulceur[1]. »

Elle usa de son crédit en faveur des poètes et des savants « qui aimcient les bonnes lettres et le Christ ». Pieuse et inclinant au mysticisme, mais curieuse d’esprit et droite de cœur, elle avait horreur des moines, de leurs mômeries, de leur ignorance et de leurs débauches. Le fin Érasme, qui raillait si joliment la bêtise en robe de bure et qui en voulait aux moines comme aux plus soigneux gardiens de l’ignorance universelle, Érasme était son auteur. En 1512, un très savant homme, Guillaume Fabri ou Lefebvre d’Etaples, publia ses commentaires sur les Épîtres de saint Paul. Ce livre, où les Écritures étaient soumises à un libre examen, devint le bréviaire de Marguerite, qui entra dans les voies de ces premiers réformateurs, gens savants et modestes qu’on peut nommer les scoliastes de l’Écriture. Elle s’engagea elle-même dans une longue

  1. Brantôme.