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enchantée. Il était, ce me semble, de l’avis de Thibault : « Quand je sçaurois ça, en serois-je plus gras’ ? »

On soupait gaiement chez sa femme, on faisait ces diableries dont Mms de Sévigné était si bien instruite. D’honnêtes gens tels que La Fontaine, Boileau, le marquis de Sévigné, y buvaient le vin de Champagne ; Champmesle- ne s’en faisait pas faute. Racine était aussi bien vu que pas un par la dame du lieu, mais non mieux que plusieurs autres.

La Fontaine écrivait, en 1676, à M11’ de Champmesle : « M. Racine n’aime rien tant que votre charmante personne. » Ces habitudes se continuèrent durant six ou sept ans. M. de Tonnerre gâta tout. Il fut aimé. C’était un poltron et un escroc, grand faiseur de niches et de brocardstt mauvais compagnon. Racine, d’ailleurs, bien près de réformer sa vie," lui céda la place.

Quand la suite des années eut amené d’irréparables changements, alors que la Champmesle se mourait à Auteuil dans sa cinquante-quatrième année, le poète chrétien écrivait à son fils que « le plus affligeant étoit l’obstination avec laquelle cette pauvre malheureuse refusoit de renoncer à la comédie ». Il écrivit encore, après que celle qui avait entendu tant de paroles de tendresse et de louange eut été mise au cercueil : « Je vous dirai en passant que je dois réparation à la mémoire de la Champmesle, qui mourut dans d’assez bons sentiments,… très repentante de sa vie passée et surtout fort affligée de mourir. » Il ne faut point

1. La Coupe enchantée, scène xvm.