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donc que le père avait pardonné à son fils de s’être fait comédien et auteur.

« Le sieur de Molière et sa troupe, écrit La Grange en tête de son registre, arrivèrent à Paris au mois d’octobre 1658 et se donnèrent à Monsieur, frère unique du Roi, qui leur accorda l’honneur de sa protection et le titre de ses comédiens, avec 300 livres de pension pour chaque comédien. » Et le registre porte en manchette : « Nota, que les 300 l. n’ont point été payées[1]. » La protection de Monsieur avait pourtant son prix. Elle permit à Molière de paraître, le 24 octobre 1658, devant la reine-mère et le roi sur un théâtre dressé dans la salle des gardes du vieux Louvre. On y représenta Nicomède.

Les nouveaux acteurs, dit la Préface de 1682, ne déplurent point, et on fut surtout fort satisfait de l’agrément et du jeu des femmes. La tragédie jouée, Molière « vint sur le théâtre, et, après avoir remercié Sa Majesté, en des termes très modestes, de la bonté qu’elle avoit eue d’excuser ses défauts et ceux de toute sa troupe, qui n’avoit paru qu’en tremblant devant une assemblée si auguste, il lui dit que l’envie qu’ils avoient eue d’avoir l’honneur de divertir le plus grand roi du monde leur avoit fait oublier que Sa Majesté avoit à son service d’excellents originaux, dont ils n’étoient que de très faibles copies ; mais que, puisqu’Elle avoit bien voulu souffrir leurs manières de campagne, il la supplioit très humblement d’avoir agréable qu’il lui donnât un de ces petits divertissements qui lui



  1. Registre, p. 3.