bants. Justine ne voulait rien croire, pas même qu’il s’appelât Crottu : elle disait que ce n’était pas un nom.
Un jour, j’allai porter mes griefs à Madame Laroque[1] qui, dans son fauteuil de tapisserie, les pieds sur sa chaufferette, m’écoutait en tricotant des bas bleus. Elle entendait mes plaintes avec bienveillance. Mais la pauvre dame se faisait vieille ; elle brouillait le passé et le présent, radotait un peu et mêlait étrangement M. Crottu avec un ancien oratorien, professeur à Granville, qui donnait, en 1793, la férule à Florimond Chappedelaine pour n’avoir point crié : vive la nation ! Mon ressentiment, que je ne pouvais répandre au dehors, m’étouffait.
Je ne me tenais pas pour vaincu. Cependant il est inutile de dire que, dans cette lutte, M. Crottu était le plus fort.
Un matin de printemps, je m’éveillai au chant des oiseaux ; des flèches de lumière, dardées par les fentes des volets, criblaient mon lit ; j’adorai la lumière du jour et la pensée de M. Crottu me fut plus amère que la mort. Ce matin-là, ma chère maman veilla,
- ↑ Voir le Petit Pierre, p. 163.