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me parut étrangement rapetissée. Ma mère y était seule et triste. Elle fit un grand cri en me voyant équipé comme un prince.

— Mon Jacques, me dit elle, je suis bien heureuse !

Et elle se mit à pleurer. Nous nous embrassâmes. Puis, s’étant essuyé les yeux avec un coin de son tablier de serpillière :

— Ton père, me dit-elle, est au Petit Bacchus. Il y va beaucoup depuis ton départ, en raison de ce que la maison lui est moins plaisante en ton absence. Il sera content de te revoir. Mais, dis-moi, mon Jacquot, es-tu satisfait de ta nouvelle condition ? J’ai eu du regret de t’avoir laissé partir chez ce seigneur ; même je me suis accusée en confession, à M. le troisième vicaire, d’avoir préféré le bien de ta chair à celui de ton âme et de n’avoir pas assez pensé à Dieu dans ton établissement. M. le troisième vicaire m’en a reprise avec bonté, et il m’a exhortée à suivre l’exemple des femmes fortes de l’Écriture, dont il m’a nommé plusieurs ; mais ce sont là des noms que je vois bien que je ne retiendrai jamais. Il ne s’est pas expliqué tout au long, parce que c’était le samedi soir et que l’église était pleine de pénitentes.