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D’ailleurs les bijoux sont pour rien en ce moment. Les femmes comme il faut n’en portent plus. On est tout aux sports, et le bijou est l’ennemi des sports.

Maurice parlait ainsi, contrairement à la vérité, parce que, ayant donné à son amie une pelisse de fourrure, il n’était pas pressé de lui faire un nouveau présent. Sans être avare, il regardait à la dépense. Ses parents ne lui faisaient pas une très forte pension, et ses dettes grossissaient tous les jours. En satisfaisant trop promptement les désirs de son amie, il craignait d’en faire renaître d’autres plus vifs. L’occasion lui semblait moins bonne qu’à Gilberte et il tenait à garder l’initiative de ses libéralités. Il se disait enfin que, s’il faisait trop de cadeaux, il ne serait plus sûr d’être aimé pour lui-même.

Madame des Aubels n’éprouva de cette attitude ni dépit ni surprise : elle avait de la douceur et de la modération ; elle connaissait les hommes, estimait qu’il faut les prendre comme ils sont ; que, pour la plupart, ils ne donnent pas très volontiers et qu’une femme doit savoir se faire donner.