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de l’objet aimé. Puis ils tombèrent tous les deux dans une muette et molle langueur.

Les rideaux étaient tirés ; la chambre baignait dans une ombre chaude où dansaient les lueurs des tisons. La chair et le linge semblaient phosphorescents ; les glaces de l’armoire et de la cheminée s’emplissaient de clartés mystérieuses. Gilberte, maintenant, accoudée à l’oreiller, la tête dans la main, songeait. Un petit bijoutier, un homme de confiance, et très intelligent, lui avait montré un bracelet merveilleusement joli, perles et saphirs, qui valait très cher et qu’on aurait pour un morceau de pain. Une cocotte dans la dèche, pressée de s’en défaire, le lui avait remis. C’était une occasion comme il ne s’en présente guère et qu’il était malheureux de laisser échapper.

— Veux-tu le voir, chéri ? Je demanderai à mon petit bijoutier qu’il me le confie.

Maurice ne déclina pas précisément la proposition. Mais il était visible qu’il ne prenait aucun intérêt au merveilleux bracelet.

— Quand les petits bijoutiers, dit-il, trouvent une bonne occasion, ils la gardent pour eux et n’en font pas profiter leurs clientes.