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aussi assidu et plus vigilant encore que M. Mignon qui, naguère, promenait ses regards investigateurs dans la rue Garancière depuis les têtes de bélier de l’hôtel de la Sordière jusqu’au chevet de l’église Saint-Sulpice. Maurice venait voir, deux et trois fois par jour, Arcade dans son hôtel garni, l’avertissait du péril et le pressait de changer de domicile.

Tous les soirs, il emmenait son ange dans les cabarets de nuit où ils soupaient avec des filles. Là, le jeune d’Esparvieu donnait ses pronostics sur le prochain match de boxe, puis il s’efforçait de démontrer à Arcade l’existence de Dieu, la nécessité d’une religion et les beautés du christianisme, et il l’adjurait de renoncer à des entreprises impies et criminelles dont il ne recueillerait qu’amertume et déception.

— Car, enfin, disait le jeune apologiste, si le christianisme était faux, cela se saurait.

Les filles approuvaient Maurice de ses sentiments religieux, et quand le bel Arcade proférait quelque blasphème dans un langage qui leur était intelligible, elles se bouchaient les oreilles et le faisaient taire, de peur d’être foudroyées avec lui. Car elles concevaient que