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quaker américain, au moyen d’un cerf-volant, lui vola son tonnerre.

» J’habitais Paris et fus de ce souper où l’on parla d’étrangler le dernier prêtre avec les boyaux du dernier roi. La France était en effervescence ; une révolution épouvantable éclata. Les chefs éphémères de l’État bouleversé régnèrent par la terreur au milieu de périls inouïs. Ils étaient, pour la plupart, moins cruels et moins impitoyables que les princes et les juges institués par Iahveh dans les royaumes de la terre ; toutefois, ils parurent plus féroces, parce qu’ils jugeaient au nom de l’humanité. Malheureusement, ils étaient prompts à s’attendrir et d’une sensibilité toujours émue. Or, les hommes sensibles sont irritables et sujets à des accès de fureur. Ils étaient vertueux ; ils avaient des mœurs, c’est-à-dire qu’ils concevaient des obligations morales étroitement définies et jugeaient les actions humaines non sur leurs conséquences naturelles, mais d’après des principes abstraits. De tous les vices qui peuvent perdre un homme d’État, la vertu est le plus funeste : elle pousse au crime. Pour travailler utile-