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lais, où paissent les bœufs, une colline boisée, qui descend doucement sur des prairies arrosées par un frais ruisseau. Là s’élevait un monastère célèbre dans toute la chrétienté. Je cachai sous un froc mes pieds fourchus et me fis moine en cette abbaye, où je vécus tranquille, à l’abri des gens d’armes qui, amis ou ennemis, se montraient également importuns. L’homme, retombé en enfance, avait tout à rapprendre. Frère Luc, mon voisin de cellule, qui étudiait les mœurs des animaux, enseignait que la belette conçoit ses petits par l’oreille. Je cueillais dans les champs des simples pour soulager les malades, à qui jusque-là, en guise de traitement, on faisait toucher les reliques des saints. Il se trouvait dans l’abbaye quelques démons, mes pareils, que je reconnus à leurs pieds fourchus et à leurs paroles bienveillantes. Nous réunîmes nos efforts pour polir l’esprit rugueux des moines.

» Tandis que sous les murs de l’abbaye, les petits enfants jouaient à la marelle, nos religieux se livraient à un autre jeu aussi vain et auquel pourtant je m’amusai avec eux ; car il