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de la voie sacrée, de vastes tombeaux, des statues, des autels et le grondement des chars devenait plus fréquent sur les dalles usées. Un jeune cerisier, apporté par un vétéran, nous apprit les conquêtes lointaines d’un consul, et des odes, chantées sur la lyre, nous instruisirent des victoires de Rome, maîtresse du monde.

» Toutes les contrées que le grand Dionysos avait parcourues, changeant les bêtes sauvages en hommes, et faisant éclore les fruits et les moissons sur le chemin de ses Ménades, respiraient maintenant la paix romaine. Le nourrisson de la Louve, soldat et terrassier, ami des peuples vaincus, traçait les routes depuis les rives de l’Océan brumeux jusques aux pentes escarpées du Caucase ; dans toutes les villes s’élevaient les temples d’Auguste et de Rome et, telle était la foi de l’univers en la justice latine, que dans les gorges de Thessalie ou sur les bords chevelus du Rhin, l’esclave, près de succomber sous un poids inique, s’écriait : « César ! » Mais pourquoi faut-il que, sur ce malheureux globe de terre et d’eau, tout se flétrisse et meure et que les plus belles choses