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grand nombre habiter près de lui cette jeune terre où leurs ailes les portaient aisément. Là, ils se plurent à aiguillonner son intelligence et à fomenter son génie. Ils lui enseignèrent à se vêtir des peaux de bêtes sauvages et à rouler des pierres devant les cavernes pour en fermer l’entrée aux tigres et aux ours. Ils lui apprirent à faire jaillir la flamme en tournant un bâton dans des feuilles sèches et à conserver sur la pierre du foyer le feu sacré. Par l’inspiration des démons ingénieux, il osa traverser les fleuves dans des troncs d’arbre fendus et creusés ; il inventa la roue, la meule et la charrue ; le soc déchira la terre d’une blessure féconde et le grain offrit à ceux qui le broyaient une nourriture divine. Il pétrit des vaisseaux dans l’argile et tailla le silex en outils variés. Enfin, demeurant parmi les humains, nous les consolions et les instruisions. Nous n’étions pas toujours visibles pour eux ; mais, le soir, au détour des chemins, nous leur apparaissions sous des formes souvent étranges et bizarres, quelquefois augustes et charmantes, et nous prenions à notre gré l’aspect d’un monstre des forêts ou des eaux, d’un homme vénérable,