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foule le Mont du Seigneur et portaient au Séraphin des hommages que l’Autre voulait pour lui seul.

» J’avais rang parmi les Dominations et mon nom d’Alaciel n’était pas sans gloire. Pour satisfaire mon esprit tourmenté par une soif insatiable de connaître et de comprendre, j’observais la nature des choses, j’étudiais les propriétés des pierres, de l’air et des eaux, je recherchais les lois qui gouvernent la matière épaisse ou subtile, et après de longues méditations, je m’aperçus que l’univers ne s’était point formé ainsi que son prétendu créateur s’efforçait de le faire croire ; je connus que tout ce qui existe, existe par soi-même et non par le caprice d’Iahveh, que le monde est à lui-même son auteur et que l’esprit est à lui-même son Dieu. Depuis lors, je méprisais Iahveh pour ses impostures et je le haïssais parce qu’il se montrait contraire à tout ce que je trouvais désirable et bon : la liberté, la curiosité, le doute. Ces sentiments me rapprochèrent du Séraphin. Je l’admirai, je l’aimai ; je vécus dans sa lumière. Lorsque enfin il apparut qu’entre lui et l’Autre il fallait choisir, je me