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quaient, et les rivalités, les jalousies qu’ils montraient les uns à l’égard des autres lui ôtaient tout espoir de les associer dans une œuvre commune. S’apercevant combien l’exil déprime les caractères et fausse les intelligences, il sentait défaillir son courage.

Un soir qu’il avoua sa lassitude à Zita, la belle archange lui dit :

— Allons voir Nectaire, Nectaire a des secrets pour guérir la tristesse et la fatigue.

Elle l’emmena dans les bois de Montmorency et s’arrêta sur le seuil d’une petite maison blanche attenante à un potager dévasté par l’hiver, où luisaient, au fond des ténèbres, les vitres des serres et les cloches fêlées des melons.

Nectaire ouvrit sa porte aux visiteurs et, ayant apaisé les abois d’un grand dogue qui gardait le jardin, les conduisit à la salle basse, que chauffait un poêle de faïence. Contre le mur blanchi à la chaux, sur une planche de sapin, parmi des oignons et des graines, une flûte reposait, prête à s’offrir aux lèvres. Une table ronde de noyer portait un pot à tabac en grès, une pipe, une bouteille de vin et des