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séminaire, se tourna vers son vicaire général :

— Je gage, dit-il, que M. Lantaigne vient encore se plaindre à moi de M. Guitrel.

L’abbé de Goulet se leva pour sortir du salon. Mais monseigneur le retint près de lui :

— Demeurez ! Je veux que vous partagiez avec moi le plaisir d’entendre M. Lantaigne, qui passe, vous le savez, pour le premier orateur du diocèse. Car, à n’interroger que la voix publique, il prêcherait mieux que vous, cher monsieur de Goulet. Mais ce n’est pas mon avis. Entre nous, je n’estime ni sa parole enflée ni sa science confuse. Il est cruellement ennuyeux, et je vous garde pour m’aider à le congédier au plus vite.

Un prêtre de haute taille et de vaste corpulence, grave, très simple, le regard en dedans, entra dans le salon et salua.

À sa vue, monseigneur s’écria joyeusement :

— Eh ! bonjour, monsieur l’abbé Lantaigne. Au moment même où vous vous êtes fait