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s’attachait pas à faire la distinction subtile de ses défenseurs et de ses adversaires. Sa pensée, plus vaste, embrassait sa patrie et le genre humain.

Il passait, chaque jour, de longues heures à se promener à la manière des lions en cage et des panthères, dans les deux petites chambres que madame de Bonmont avait fait tendre de soie bleue et garnir de sièges profonds, dans une autre espérance. Il allait à grands pas et murmurait :

— Je leur crèverai la paillasse !

Elle, cependant, assise à un bout de la chaise longue, le suivait d’un regard timide et recueillait ses paroles avec inquiétude. Non que les sentiments qu’elles exprimaient lui parussent indignes de l’homme aimé : soumise à l’instinct, docile à la nature, elle admirait la vigueur sous toutes ses formes et elle se flattait de l’espoir vague qu’un homme capable de tant de carnage serait capable, dans une autre heure, d’embrasse-