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driez, comme moi, la puissance des curés. Et vous-même, ne vous surprenez-vous pas parfois sinon à croire, du moins à désirer l’immortalité ?

— Docteur, répondit M. Bergeret, je pense à ce sujet comme madame Dupont-Delagneau. Madame Dupont-Delagneau était fort vieille quand mon père était fort jeune. Elle l’aimait beaucoup et causait volontiers avec lui. Il touchait par elle au xviiie siècle. J’ai recueilli sur sa bouche certains propos de cette dame et celui-ci entre autres :

» Comme elle était malade, à la campagne, son curé l’alla voir et lui parla de la vie future. Elle répondit, avec une petite moue dédaigneuse, qu’elle se défiait de l’autre monde. « Vous m’assurez, dit-elle, que celui qui l’a fait est le même qui a fait ce monde-ci. Je ne sais que trop comment il travaille. » Eh bien ! docteur, j’ai pour le moins autant de méfiance qu’en avait madame Dupont-Delagneau.