Page:Anatole France - L’Anneau d’améthyste.djvu/121

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il fallait l’admirer, la dame européenne, connaissant toutes les sociétés du globe, de ne pas trop les embrouiller dans sa tête. Son cerveau contenait l’annuaire des salons de toutes les capitales, et elle ne manquait pas d’un certain sens mondain ; sa bienveillance était universelle. Si elle avait nommé M. Raoul Marcien, c’était en toute innocence. Elle était l’innocence même. Elle ignorait le mal. Bonne épouse et bonne mère, ayant pour foyer un sleeping-car, un wagon-lit sur des voies ferrées, elle était une femme d’intérieur. Sous son corsage où le jais et l’acier jetaient des éclairs avec un bruit de grêle, elle portait un corset de grosse toile grise. Ses femmes de chambre ne doutaient point de sa vertu.

— Chère amie, chère amie, vous savez, monsieur Raoul Marcien, il s’est battu avec monsieur Isidore Mayer.

Et dans son langage d’international office, d’agence pour voyageurs, elle conta l’affaire,